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LE CONTEUR BRETON

tagne d’Arrée, comme s’ils avaient un diable à trousses ou un tison sous la queue. — Quoi qu’il en soit, Jean marchait et courait comme un dératé, si bien que, harassé, il tomba sur la face. Il avait été frappé, probablement, par le lutin qui rôde la nuit dans les bois et les prés.

Le meunier du Passage-des-Souris, sortant de chez lui après avoir mangé sa bouillie, entendit quelque chose, et alla de ce côté en grignotant son croûton. Le voilà qui rencontre Jean : — Que vous est-il arrivé, mon brave homme, dit le meunier, quand il l’aperçut ? Vous faites pitié ! — Une foule de choses, hélas ! monseigneur saint Herbot béni, dit Jean. Je meurs de faim et suis harassé à force de galoper dans les bois. — Tenez, mon pauvre homme, dit le meunier, en donnant à Jean la lèche de pain qu’il avait encore à la main.

— Il est bien bon, dit Jean, en avalant d’une bouchée le pain du meunier ; que Dieu vous bénisse mille fois, vous m’avez rendu la vie. Jamais je n’ai trouvé mets plus agréable à mon cœur que ce morceau de pain. — Et Jean alors de se lever sur ses jambes, — Allons au moulin, dit le meunier du Passage-des-Souris, car les vêtements que vous portez sont en lambeaux et couverts de boue aussi. De plus, vous tremblez de froid ou de la fièvre. — Jean n’avait pas assez de force pour marcher, et le meunier lui donna la main. Tous deux se dirigèrent alors à leur aise vers le moulin.