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l’avait dit, c’était l’amour de la vérité qui la poussait à parler ainsi. Au fond du cœur elle ne se disait pas qu’Arthur Wilkinson pensât du tout à elle. Depuis longtemps elle croyait savoir à quoi s’en tenir là-dessus. Elle se sentait semblable au « pauvre cerf isolé et abandonné de son ami. »

Dans ses sentiments on n’eût pu rien trouver qui ressemblât à l’espérance. Arthur lui avait demandé conseil, et elle l’avait conseillé selon sa conscience.

Soyez-lui donc miséricordieux, ô mes lecteurs. Soyez miséricordieuses, vous surtout, mes chères lectrices ! J’abandonne volontiers à tout votre courroux, à tout votre dédain les autres amoureux dont mon histoire est peuplée.

— C’est vrai ; même alors je serais plus riche que Young, dit Wilkinson à demi-voix, comme s’il se parlait à lui-même. Mais ce n’est pas là le principal. Je n’ai même jamais pensé à la chose sous ce point de vue. Il y a la maison, — le presbytère, veux-je dire. Il est déjà tout plein de cotillons (c’est avec cette irrévérence que Wilkinson parlait de sa mère et de ses sœurs). Quelle autre femme voudrait y venir ?

— C’est là le trésor qu’il vous faut chercher, dit Adela en riant.

Elle pouvait rire : pour elle toute l’amertume de la chose était passée, — du moins elle le croyait. En parlant ainsi, elle ne pensait plus à elle-même.

— Vous, Adela, viendriez-vous dans une pareille maison ?

— Vous voulez savoir si, — en supposant que sous