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suivre. Lorsque j’étais si malheureuse, l’été passé à Londres, ma tante et moi nous avons causé de nos affaires avec une certaine personne. M. Bertram l’apprit pendant qu’il se trouvait à Paris ; il s’en fâcha et il m’écrivit une lettre. Ah ! quelle lettre ! Je n’aurais pas cru possible qu’il pût m’adresser de telles paroles. J’étais folle de douleur et je montrai cette nouvelle lettre à la même personne. Tenez, Adela, je vais tout vous dire : cette personne était M. Harcourt, l’ami intime de George. Dans cette lettre, George me recommandait tout spécialement de ne plus parler de nos affaires à M. Harcourt — et cependant je fis cette chose. Mais le chagrin m’avait fait perdre la tête ; je me disais : Pourquoi obéir à un homme qui n’a pas le droit de me commander et qui pourtant me commande si durement ? Une simple prière de lui m’aurait trouvée docile.

« Mais je sais que j’ai eu tort, Adela. Je ne l’ai pas ignoré un seul instant depuis le moment où j’ai montré la lettre. Je sentais bien que j’avais eu tort, puisque je n’osais pas dire à George ce que j’avais fait. J’en étais venue à avoir peur de lui, et avant cela je n’avais jamais eu peur de personne. Enfin, je ne le lui ai pas dit, mais il a fini par le découvrir. Je n’ai pas voulu lui demander comment il l’avait appris, mais je crois le savoir. Il y a une chose dont je suis certaine, c’est qu’il n’a employé ni ruse ni petitesse d’aucune sortie pour le découvrir. Il n’a cherché à rien savoir. Cela a été un coup de foudre pour lui, et il est venu tout de suite pour savoir la vérité de moi. Je la lui ai dite, et voilà le résultat.