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disait-il, auquel les autres s’adressaient, — avec cette différence seulement que, tandis que les autres l’invoquaient avec un enthousiasme fanatique, il le regardait, lui, avec les yeux de la calme raison. Mais c’était le même Dieu, assurait-il. Et quant au Sauveur, il avait aussi bien des choses à dire sur ce chapitre, bien des choses qui prouveraient qu’il n’était pas si éloigné de la croyance générale qu’on avait l’air de le supposer. Et de cette façon, il prouvait à qui voulait l’entendre qu’il n’était pas un impie.

Mais pouvait-il se satisfaire ainsi lui-même, quand il entendait de nouveau les chants de son enfance ? Quand il se rappelait, tout en écoutant, qu’il avait perdu à jamais cette beauté qui lui avait coûté si cher ? Ne commençait-il pas à penser, — disons mieux, à sentir, — qu’après tout, le son des cloches est joyeux, qu’il est doux de s’agenouiller où les autres s’agenouillent, plus doux encore d’entendre les voix d’enfants répondre en chœur aux prières ? Était-il donc à ce point plus sage que les autres, qu’il dût se tenir à part, sur la foi de son propre jugement, et rejeter comme inutile ce que tant d’hommes tenaient pour si précieux ?

Voilà ce qu’il se disait, tout en s’asseyant, s’agenouillant, ou se tenant debout, là, dans l’église, machinalement et comme par la force du souvenir des anciennes habitudes. Puis il essaya de prier. Mais la prière n’est point, tant s’en faut, une des occupations les plus faciles auxquelles un homme puisse se livrer. Il est facile de se mettre à genoux ; plus facile encore