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au monde pour lui rendre la maison agréable. Je lui ai conservé le cabinet de travail de son cher père ; et à l’écurie, il a son propre cheval qui ne sert qu’à lui. — chose que n’avait pas son père.

— Mais Arthur a son traitement d’agrégé.

— Et ne le perdrait-il pas en se mariant ? Tâchez donc de lui dire quelque chose qui le rende un peu plus satisfait. Je ne dis rien de sa conduite vis-à-vis de moi, car je ne pense pas qu’il ait l’intention de me manquer en quoi que ce soit.

Bertram trouva enfin moyen de s’échapper. Il prit son chapeau et suivit le sentier du bord de l’eau qui menait à West-Putford, — ce même sentier que prenait Arthur Wilkinson lorsqu’il allait à la pêche, dans cet heureux temps de sa jeunesse où il n’avait encore eu ni avancement ni succès.

Mais, pour le moment, George ne pensait ni à Arthur ni à Adela. Sa propre douleur était assez grande pour le rendre momentanément égoïste. Caroline Waddington allait se marier ! se marier si tôt après avoir brisé sa première chaîne ! Elle allait épouser Henry Harcourt. Il perdait à jamais toute chance, tout espoir, toute possibilité de recouvrer le trésor qu’il avait repoussé.

Désirait-il maintenant le recouvrer ? N’était-il pas clairement prouvé aujourd’hui qu’elle ne l’avait jamais aimé ? Ils s’étaient séparés au mois de mai, alors que les fruits succédaient aux fleurs, et ces mêmes fruits n’étaient pas encore mûrs qu’elle s’était déjà donnée à un autre ! Elle, l’aimer ? Non, jamais. Était-elle seu-