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s’il y avait des nouvelles d’Arthur, et quand celui-ci reviendrait. Il avait reçu un coup affreux, un coup étourdissant, mais il se sentait la force d’ajourner la défaillance qui devait s’ensuivre jusqu’au moment où nul œil ne la verrait. Le déjeuner se passa en silence. Chacun savait ce que contenaient ces deux lettres. Une des jeunes filles les avait même tenues à la main ; elle avait reconnu l’écriture de l’une, et elle avait deviné celle de l’autre. Mais, de toute façon, on l’aurait su. Les secrets que nous croyons les mieux cachés ne sont-ils pas connus de tout le monde ?

Après le déjeuner, Bertram s’évada, — ou plutôt il tenta de s’évader, car madame Wilkinson l’aperçut et l’arrêta au passage. Elle ne lui avait encore rien dit au sujet de son mariage : elle avait montré une rare discrétion, et elle entendait maintenant en recueillir la récompense.

— George ! George, lui dit-elle, au moment où il décrochait son chapeau dans le vestibule, j’ai besoin de toi, ici, une minute. Et George entra dans la salle à manger au moment où les jeunes filles en sortaient.

— J’ai peur que tu ne m’aies trouvée bien peu aimable de ne t’avoir pas encore parlé de ce qui t’arrive.

— Pas du tout, ma tante. (Madame Wilkinson n’était pas sa tante, mais il l’avait appelée ainsi depuis le moment où, tout petit, il avait vécu à Hurst-Staple.) Il est des choses dont, à mon avis, il vaut mieux ne pas parler. Mais madame Wilkinson n’était pas femme à se laisser arrêter si facilement.

— Certainement, — à moins que ce ne soit tout à