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fermement que ce sera l’avis de tout le monde. S’il en était autrement, j’aurais perdu mon temps.

M. Arthur Wilkinson ne méritait point la femme que la généreuse Providence lui accorda ; il n’était pas digne d’elle, dans le sens habituel de ce mot. Il n’était pas mauvais, si on le compare à la plupart des hommes ; mais elle… Je n’ose me laisser aller à la louer, de peur qu’on ne me dise qu’elle est de ma création, — ce qui ne serait pas entièrement vrai.

Il ne la méritait pas : c’est-à-dire que les trésors de caractère et de valeur morale qu’il apporta à la communauté étaient bien moindres, tout compte fait, que ceux que possédait Adela. Ce fut un des résultats naturels de sa supériorité, qu’elle se montra toujours pleinement satisfaite de son marché, — après comme avant le mariage. S’il lui arriva de se peser dans la balance avec lui, il ne lui sembla jamais que le plateau qui portait les vertus de son mari fût le plus léger. Elle le prit pour seigneur, et d’un cœur fidèle et tendre, elle le reconnut toujours pour son chef et son maître. Il était l’étoile polaire vers laquelle elle se tournait, contrainte par un aimant irrésistible de l’âme. Digne ou indigne, il fut tout ce qu’elle avait espéré, les os de ses os et la chair de sa chair ; le père de ses enfants, le seigneur de son cœur, le guide de ses pas, l’appui de sa maison.

Quel homme jamais mérita complètement d’obtenir une jeune fille pure, sincère et honnête ? La vie des hommes n’est pas compatible avec une semblable pureté, une semblable honnêteté ; j’oserais presque