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— Et moi, qu’ai-je fait ? dit-elle enfin. Si votre bonheur est brisé, qu’est devenu le mien ? Je me dis quelquefois que je ne pourrai supporter la vie. Avec lui, ajouta-t-elle après un moment de silence, je ne la supporterai pas. Si les choses en viennent là, George, je veux mourir. Elle se leva, traversa le salon, et lui prit vivement le bras.

— George, vous me protégerez ; dites-moi que vous me sauverez de cela.

— Vous protéger ! répéta-t-il en osant à peine la regarder en face. Comment pourrait-il la protéger ? Comment la sauver du maître qu’elle s’était donné ? Il lui eût été aisé, sans doute, de la consoler par des promesses, mais il ne se sentait pas le courage de lui promettre ce qu’il ne pourrait pas tenir. Si, le testament lu, sir Henry Harcourt insistait pour emmener sa femme, comment la protégerait-il, lui, George Bertram, — lui surtout ?

— Vous ne me livrerez pas à lui, s’écria-t-elle avec égarement. Si vous le faites, mon sang retombera sur votre tête. George ! George ! dites que vous m’épargnerez cela. Sur qui dois-je compter maintenant, si ce n’est sur vous ?

— Je ne pense pas qu’il vous emmène de force.

— Mais s’il le fait, resterez-vous là à me voir traiter ainsi ?

— Non, certes. Mais, Caroline…

— Eh bien ?

— Il vaudrait mieux que je ne fusse pas forcé d’intervenir. Le monde oublierait que je suis votre cousin,