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vous faire plaisir, monsieur. Et, en disant ces mots, madame Wilkinson ramassa avec dignité ses lunettes et sortit de la chambre d’un pas majestueux.

Arthur ne se sentait pas très-content de la façon dont l’entrevue s’était passée. Pourtant, s’il eût été sage, il aurait compris qu’il avait tout lieu d’être satisfait. La question avait été abordée ouvertement : c’était déjà beaucoup ; et, dans la discussion, madame Wilkinson n’avait pas été victorieuse, tant s’en faut. Elle avait menacé d’en appeler à lord Slapledean, et cette menace même prouvait de reste qu’elle ne se sentait pas assurée de son droit. Arthur avait tout lieu d’être content, mais il ne l’était guère.

Il lui fallait maintenant attendre la réponse d’Adela.

Les malheureux qui font des offres de mariage par lettre doivent trouver le temps long, ce me semble, dans l’intervalle entre la demande et la réponse. Arthur avait deux jours pleins à attendre, et Dieu sait si les heures lui parurent longues. Deux soirées entières se passèrent après la conversation racontée ci-dessus, avant qu’il reçût de réponse.

Deux terribles soirées ! Sa mère était majestueuse, froide et maussade ; ses sœurs, silencieuses et pleines de dignité. Il était évident qu’on leur avait tout raconté, et cela de façon à les liguer contre lui. Il ne savait pas au juste ce que sa mère avait pu leur dire au sujet de leur pauvreté future, mais il comprenait, à n’en pouvoir douter, qu’elle leur avait expliqué qu’il était un monstre dénaturé qui les chassait de chez lui.