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Je lui ai acheté une maison que j’ai meublée comme pour une duchesse…

— Eh ! grands dieux ! cela me regarde-t-il ? Vous ai-je dit d’acheter une maison ? Si vous n’aviez pas donné à votre femme une chaise pour s’asseoir, m’en serais-je plaint ? Je vous le dis positivement, je ne me mêlerai de rien.

— Ce sera tant pis pour elle alors ; voilà tout.

— Que Dieu lui vienne en aide ! Il faut qu’elle supporte son sort, comme moi le mien, et vous le vôtre.

— Et vous refusez de porter mon message à votre oncle ?

— Sans doute. Je ne sais même pas encore si je le verrai. Si je le vois, je ne lui parlerai certes pas d’argent, à moins qu’il ne le désire. Je ne lui parlerai de vous non plus, qu’autant qu’il paraîtra le vouloir. S’il s’informe de vous, je lui dirai que vous êtes venu me voir.

La discussion se prolongea encore un peu, puis Harcourt s’en alla. George Bertram ne pouvait comprendre quel motif l’avait amené chez lui. Mais l’homme qui se noie s’accroche à tout, fût-ce à un fétu de paille. Sir Henry était cruellement préoccupé de l’idée que, s’il y avait quelque chose à faire à l’égard de la fortune du millionnaire, il fallait agir sur-le-champ ; que, s’il y avait une bonne mesure à prendre, il ne fallait pas perdre de temps. Une semaine encore, un jour peut-être, et M. Bertram serait parti pour ce monde où l’on ne fait plus de testaments. Il serait trop tard alors pour conclure un marché et pour sti-