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enfin à Caroline et à ses espérances détruites, lorsque la porte s’ouvrit et sir Henry Harcourt entra.

— Comment allez-vous, Bertram ! lui dit l’ex-solliciteur général en lui tendant la main. Le geste et les mots étaient ceux de l’amitié, mais l’expression du visage n’était nullement amicale. Un grand changement s’était fait chez Harcourt. Il avait perdu son air de jeunesse, et on l’aurait volontiers pris pour un homme d’âge mûr qui aurait beaucoup souffert. Il était maigre, hagard et blême, et, à voir la dureté des lignes qui sillonnaient son front, on comprenait qu’il n’aurait pas demandé mieux que d’éclater, si la chose eût été possible.

— Et vous-même, Harcourt, comment allez-vous ? dit Bertram en acceptant la main qui lui était offerte. — Je ne me figurais pas que vous eussiez appris mon retour.

— Mais oui, je le savais. Je me doutais que vous reviendriez bien vite dès que vous sauriez que le vieux se mourait.

— Je suis heureux, en tout cas, d’être revenu à temps pour le revoir, dit Bertram sans daigner se défendre de l’accusation sous-entendue.

— Quand allez-vous là-bas ?

— Demain, je pense. Mais je compte sur un mot de mademoiselle Baker dans la matinée.

Sir Henry, qui ne s’était pas assis, se mit à se promener de long en large dans la chambre, tandis que Bertram debout, le dos au feu, l’examinait. Le front de sir Henry se rembrunissait de plus en plus ; il tenait