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casion, et elle n’avait pas su la saisir. Il ne renouvela pas ses protestations. Au contraire, il alluma un cigare, et s’en alla sur l’avant du bateau. — Après tout, Arthur a raison, se dit-il ; le mariage est une affaire trop sérieuse pour être bâclée ainsi dans un voyage d’Alexandrie à Southampton.

Heureusement pour madame Cox, tout le monde n’était pas de l’avis de George. Il venait de la quitter cruellement, impitoyablement, perfidement ; il s’éloignait d’un pas où l’on entendait résonner la joie et le triomphe de sa libération, et il l’avait laissée seule, assise auprès de la claire-voie. Mais elle ne resta pas longtemps abandonnée. Pendant qu’elle suivait du regard Bertram qui s’en allait, la tête du major Biffin lui apparut soudain à l’ouverture de l’escalier du salon. La pensée de la comparer à une tête à perruque ne lui vint pas cette fois.

— Eh bien, madame ? dit le major en l’abordant.

— Eh bien, monsieur ! — et le major crut voir dans l’œil de la veuve quelque chose qui rappelait les regards d’autrefois.

— Nous voici bien près d’arriver, madame Cox, dit le major.

— Bien près, en effet, dit madame Cox. Puis il y eut un moment de silence, dont le major profita pour prendre un siège à côté de son interlocutrice.

— J’espère que vous avez aimé votre voyage, dit-il enfin.

— Quel voyage ? demanda-t-elle.

— Oh ! le voyage, depuis Alexandrie, bien entendu,