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— Comment, si c’était là tout ? Annie, que voulez-vous dire ?

— Si j’aimais réellement un homme, il me serait bien égal qu’il fût pauvre. Mais votre soi-disant pauvreté, je le parierais, est ce que j’appellerais de l’opulence.

— Non pas. Ma pauvreté est de la vraie pauvreté. Mon revenu actuel ne se monte guère qu’à cinq mille francs.

— Oh ! je ne comprends rien aux affaires d’argent, moi. Je n’y ai jamais rien compris. Je n’étais qu’une enfant quand j’ai épousé Cox. Mais je croyais, monsieur Bertram, que votre oncle était très-riche.

— C’est vrai. Il est riche comme une mine d’or. Mais nous ne sommes pas très-bons amis — ou du moins nous ne le sommes pas assez pour qu’il y ait probabilité que j’hérite d’un sou à sa mort. Il a une petite-fille.

Ces détails, et quelques autres du même genre, firent comprendre à madame Cox qu’une certaine circonspection était nécessaire. Elle savait, à n’en pouvoir douter, que le major Biffin possédait, outre sa paye, un revenu très-convenable. Il était certain qu’il ressemblait jusqu’à un certain point, comme elle l’avait elle-même dit, à une tête à perruque. Il était certain aussi que George Bertram était fort aimable, et qu’il faisait la cour d’une façon bien autrement agréable que le major. Madame Cox savait tout cela, mais elle savait aussi que, « quand la pauvreté entre par la porte, l’amour s’envole par la fenêtre, » au dire du proverbe ;