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mots fussent dits très-bas, George les entendit distinctement.

— Chère, chère Annie !

— Mais je ne vous ai pas permis de dire cela.

— Puisque c’est vrai.

— Est-ce bien vrai ?

— Oui… très-chère, — la plus chère… après elle. Cela vous fâche-t-il ?

— Non, cela ne me fâche pas, mais…

— Mais quoi ?

Elle le regarda en faisant une petite moue charmante. Un sourire errait sur ses lèvres, une larme tremblait sous sa paupière ; son épaule le touchait et il sentait palpiter son cœur. Jamais elle n’avait paru si belle, si séduisante.

— Mais quoi ? Que vouliez-vous dire, Annie ?

— Voici ce que je voulais dire… Mais je sais que vous allez me trouver trop hardie.

— Je ne vous trouverai pas trop hardie, si vous dites la vérité.

— Eh bien ! je voulais dire ceci : si j’aimais quelqu’un, je saurais l’aimer aussi tendrement qu’elle a pu vous aimer.

— Le sauriez-vous, Annie ?

— Oui, je le saurais. Mais je ne me laisserais pas repousser et éloigner par lui, comme vous dites que vous l’avez repoussée — jamais, jamais ! Il pourrait me tuer, mais lorsqu’une fois je lui aurais dit que je l’aimais, rien ne pourrait ensuite me détacher de lui.

— Dites-le-moi donc, Annie.