— Je ne vois pas quel mal il peut y avoir à donner aux gens leurs noms de baptême. Vous fâcheriez-vous si je vous appelais Annie ?
— Cela dépend. Dites-moi, monsieur Bertram, combien y a-t-il de femmes que vous appelez de leurs petits noms ?
— Une ou deux douzaines, je crois.
— J’en étais sûre.
— Et puis-je vous ajouter à la liste ?
— Non, certes.
— Et pourquoi pas ? Nous sommes si liés que j’aurais pensé…
— Je ne veux pas faire partie d’une ou deux douzaines. Et en disant ces mots, elle avait quitté son ton railleur, et elle parlait tout bas d’une voix douce et émue. Le cœur de Bertram en fut tout attendri.
— Et s’il n’y en avait pas une, — pas une seule ? S’il n’y en avait pas d’autre que vous aujourd’hui ?
— Pas d’autre aujourd’hui… Vous dites : aujourd’hui ? Il y en avait donc une ?
— Oui, il y en avait une.
— Et elle… parlez-moi d’elle.
— C’est une histoire que je ne puis raconter.
— Pas même à moi ? Je ne vous en aimerai pas moins, parce que vous me l’aurez racontée. Dites-la-moi, je vous en prie.
Et de nouveau la petite main pressa doucement le bras de Bertram.
— J’ai bien vu qu’il y avait quelque chose qui vous rendait malheureux.