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mande M. Harcourt. M. George, M. George ! prenez garde, je vous en prie ! Voyons ! ne pourriez-vous pas acheter quelques canards ou quelques pigeons et les emporter avec vous dans un panier ? Monsieur se fait vieux, et il a l’air de se soucier de ces choses-là maintenant. Il y a dix ans, c’était bien différent. Douze millions et demi, M. George ! cela vaut bien un peu de raisin et quelques dindonneaux.

Et M. Pritchett, voyant que tout ce qu’il disait ne produisait aucun effet, secoua tristement la tête et se tordit les mains.

George alla enfin à Hadley sans pigeons, sans raisins et sans dindonneaux. L’industrieuse activité de son ami le fit rire. « Labor omnia vincit improbus, se dit-il. Harcourt finira peut-être par découvrir le côté sensible de mon oncle. »

Bertram trouva son oncle fort changé. Le vieillard retrouvait encore, de temps à autre, des éclairs de sa verve sarcastique d’autrefois, et alors il se ranimait et redevenait malveillant, acariâtre et volontaire, comme par le passé ; mais la vieillesse l’avait cruellement éprouvé. Son humeur ne se trahissait guère plus que par des haussements d’épaules, des branlements de tête, et par une habitude nouvellement contractée de se frotter vivement les mains l’une contre l’autre.

— Eh bien ! George, fit-il, lorsque son neveu lui eut serré la main en lui demandant des nouvelles de sa santé.

— J’espère que vous allez mieux, mon oncle ; j’ai été bien fâché d’apprendre que vous avez été de nouveau souffrant.