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dre peine. Ne vous est-il jamais venu à l’idée que ces choses-là coûtent de l’argent ?

— Je suis prête à y renoncer sur l’heure, si vous le désirez.

— Vous savez que tout cela n’a pas le sens commun.

— C’est vous qui avez voulu m’entourer de tout ce luxe, et votre reproche est injuste, — je dirai plus, il n’est pas loyal.

— Les femmes se font des idées singulièrement larges de la loyauté masculine. Elles se croient toutes le droit de tout avoir et de ne rien faire. Vous parlez de justice ! Savez-vous que, quand je vous ai épousée, je comptais sur la fortune de votre oncle ?

— Non certes, je ne le savais pas ; si je l’avais su, je vous aurais dit combien votre espérance me semblait chimérique.

— Alors pourquoi diable ?… Il s’arrêta et n’acheva pas sa phrase. Il ne se sentait pas le courage de lui dire, malgré tout, qu’il ne s’était marié que dans cette espérance, et il se contenta de sortir de la chambre en battant les portes.

Ah, oui ! Elle avait jeté sa perle à l’abîme ! C’était, donc là la vie à laquelle elle s’était volontairement condamnée ! C’était ainsi qu’on traitait cette Caroline Waddington qui s’était jadis promis de conquérir le monde et d’y régner. Elle s’était donnée à une brute qui ne l’avait prise que parce qu’elle avait quelques chances d’être l’héritière d’un vieillard riche.

Alors elle songea à la perle perdue. Comment n’y aurait-elle pas pensé ? Elle songea à ce qu’aurait été sa