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court avait joué dans toute cette affaire, et à se rappeler la façon adroite dont cet aimable compagnon s’y était pris pour lui escamoter sa femme. Il y avait sans doute de la vérité dans les observations que lui avait faites Adela : mais pourquoi était-il tenu de ménager le bonheur de sir Henry ? Pourquoi s’inquiéterait-il du bonheur de quelque homme, ou même de quelque femme que ce fût ? Qui donc s’était inquiété du sien ? qui l’avait ménagé, lui ? Donc, il loua un cheval, et se promena dans les parcs quand il savait y rencontrer lady Harcourt ; il dîna avec le baron Brawl quand lady Harcourt devait y être ; et il alla au bal chez madame Madden pour la même raison. M. le solliciteur-général voyait tout cela, et ne pressait plus son ami de venir prendre part à ses petits dîners intimes.

Il est difficile de dire d’une manière précise ce qui se passa entre sir Henry et sa femme à ce sujet. En général, un homme répugne à taxer sa femme d’infidélité lorsque l’infidélité n’est encore qu’en germe, et il ne lui fait pas volontiers remarquer qu’elle s’occupe plus d’un autre que de lui. Il est à présumer que le front de sir Henry s’assombrit, que sa parole devint plus brève et ses manières moins empressées, mais il y a tout lieu de croire qu’il ne parla pas de Bertram. Caroline dut s’apercevoir cependant qu’il ne se souciait plus d’attirer chez lui son ancien ami.

Au bal de madame Madden, Bertram pria Caroline de danser avec lui, et elle consentit à lui accorder une contredanse. M. Madden était un jeune et opulent membre du parlement, ami intime de sir Henry ainsi