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au salon pendant un quart-d’heure tout au plus.

Mais le baron Brawl ne remonta pas. Son club avait pour lui de trop fortes séductions. M. Stistick reparut au salon pendant quelques instants pour enlever madame Stistick aux plaisirs du monde.

Ce couple parti, George Bertram se trouva seul, encore une fois, pendant cinq minutes, avec Caroline Waddington.

— Adieu, lady Harcourt, dit-il en essayant de nouveau de lui prendre la main. Ces mots et le simple bonjour de l’arrivée étaient les seules paroles qu’il lui eut adressées.

— Bonsoir, monsieur Bertram. Enfin sa voix s’altéra, enfin son regard s’abaissa, enfin sa main trembla ! Si elle eût pu supporter avec fermeté cette dernière épreuve, tout était sauvé ; mais elle, qui savait si bien se dominer devant des indifférents, ne sut pas soutenir le regard de George étant seule avec lui. Un seul indice d’attendrissement, un seul signe de tendresse, suffisaient pour tout perdre ! Elle ne sut pas cacher cet indice, elle ne put pas s’empêcher de donner ce signe.

— Nous sommes toujours cousins, du moins, dit-il.

— Oui, nous sommes cousins, — cela va sans dire.

— Et, en cette qualité, il n’est pas besoin de nous haïr ?

— Nous haïr ! Et elle frémit en disant ces mots. Non, non, il n’y a pas de haine entre nous, j’espère.

Il demeura silencieux pendant quelques secondes, sans la regarder. Il semblait ne voir que les riches et