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que son abdication à peu près forcée de la seule position honorable qu’il eût encore acquise.

Et voilà que de nouveau le succès d’Harcourt s’imposait à lui ! Harcourt était parvenu à posséder ce trésor dont Bertram avait fait le but de tous ses efforts, ce qu’il avait regardé comme la récompense de tous ses labeurs. Et pourtant, qu’était Harcourt comparé à lui ? George se savait une âme mieux trempée, des talents plus brillants et une plus haute capacité. Il ne daignait même pas se comparer à cet homme qui l’avait distancé dans la course de la vie !

C’était pendant qu’il était en proie à ces pensées et à ces souffrances qu’il s’était mis à l’œuvre avec toute l’ardeur dont il était capable. Il ne rechercherait plus aujourd’hui, se disait-il, une prompte récompense. Son premier et principal désir était d’amortir la douleur qui lui torturait l’âme ; et plus tard seulement, si faire se pouvait, il revendiquerait sa place parmi les dignes fils de l’Angleterre, en laissant au temps le soin d’assurer cette revendication.

On comprend que, dans ces dispositions, George n’éprouvât pas une grande consolation à voir arriver son père. Sir Lionel se montrait assez irritable vis-à-vis de son fils. Il lui reprochait d’avoir mal mené sa barque, s’obstinait à lui parler de Caroline, et, chose peut-être plus pénible encore, du solliciteur général ; il le poussait sans cesse à faire des avances à son oncle en vue d’une réconciliation, et demandait enfin à emprunter, d’abord cent, puis deux cents, puis enfin trois cents francs. En ce temps-là, George n’avait que