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ne dit rien de « Mary » et se contenta d’appeler mademoiselle Baker « très-chère amie ». Il n’était pas nécessaire d’en dire bien long pour se faire comprendre d’elle, et sir Lionel ne dit que tout juste ce qu’il fallait. Il ajouta seulement, par précaution, qu’il lui semblait meilleur, dans leur intérêt à tous deux, de ne communiquer la nouvelle de son offre à personne pour le moment.

Mademoiselle Baker avait presque retrouvé sa sérénité habituelle quand cette lettre lui parvint. Son chagrin avait toujours été doux et calme. Elle ne s’était livrée à aucun transport de douleur, et ses lamentations n’avaient été ni bruyantes ni violentes. Une faible et douce teinte de mélancolie s’était répandue sur elle, de sorte qu’elle avait soupiré fréquemment en prenant son thé solitaire, et elle avait oublié de tourner les feuillets de son roman. « Ne serait-ce pas meilleur, s’était-elle dit souvent, d’aller à Hadley ? Tout changement ne serait-il pas bon ? » Elle sentait maintenant tout le poids de l’absence de Caroline et se disait qu’il vaudrait mieux quitter Littlebath. On ne saurait croire combien cette affaire de mademoiselle Todd l’avait raccommodée avec l’idée d’aller vivre à Hadley.

Et voilà qu’au moment où elle se tranquillisait, quand elle était résignée et presque heureuse, il lui arrivait cette horrible lettre pour bouleverser son esprit et la rejeter dans de nouvelles complications et dans toutes sortes de difficultés ?

Elle ne s’était jamais dit, à aucune époque, que, si sir Lionel se proposait, elle l’accepterait. Elle n’avait