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dant toute la période des fêtes du mariage le vieillard, au dire de mademoiselle Baker, n’avait jamais laissé échapper un reproche ou une parole de colère à l’adresse de George. Après tout, celui-ci avait peut-être, encore aujourd’hui, de plus belles chances qu’eux tous. Ah ! s’il avait voulu seulement se laisser guider par les règles de la plus vulgaire prudence, quel beau jeu il avait ! Mais, comme le disait M. Pritchett, George n’avait pas de bon sens. De plus, sir Lionel ne pouvait se dissimuler que son frère ne sanctionnerait jamais son mariage avec mademoiselle Baker. Quelque généreuses que fussent les intentions de M. Bertram à l’égard de celle-ci, il la déshériterait indubitablement, si un pareil mariage avait lieu. Si sir Lionel se décidait à épouser mademoiselle Baker, il fallait donc retarder leur union jusqu’au moment où cet insupportable vieillard aurait quitté la scène du monde, et de plus il fallait lui cacher soigneusement ce projet matrimonial.

Mais si sir Lionel se tournait du côté de mademoiselle Todd, la situation était bien différente. Avec elle, point de secret à garder, point de délai, point de crainte — si ce n’est la crainte de n’être accepté, et cette autre crainte ultérieure, mais tout aussi fondée, de ne point être maître au logis.

Après avoir bien considéré toutes ces choses et les avoir mûrement pesées dans son noble esprit, sir Lionel résolut de mettre aux pieds de mademoiselle Todd, son cœur, sa main et sa fortune. S’il était accepté, il lutterait avec tout ce qu’il se sentait d’énergie virile