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ordinaire du teint de cette dame. Mademoiselle Todd était perpétuellement rougissante. Sur son visage se voyaient toujours les plus belles couleurs. Ce n’était pas seulement que sur ses joues on admirât une teinte vermeille, fixe et brillante ; à chaque sourire — et mademoiselle Todd souriait toujours — cette teinte s’étendait à son front et à son cou ; à chaque éclat de rire — et les éclats de rire de mademoiselle Todd étaient innombrables — le coloris devenait de plus en plus vif — allant et venant, ou pour mieux dire venant toujours et ne s’en allant jamais — jusqu’à tant que le reflet de son visage illuminât le salon entier et semblât éclairer les physionomies de tous ceux qui l’entouraient. Sous le coup du compliment de madame. Leake elle rougit, à en devenir violette. Jusqu’à ce jour elle s’était amusée de tous les petits commérages auxquels sa position de vieille fille, encore jeune, avait donné naissance, et elle avait pris plaisir à les répéter elle-même avec une certaine affectation ; mais il y avait un venin chez ce vieux serpent femelle, un dard chez cette vieille vipère qui atteignit jusqu’à l’indifférence de mademoiselle Todd.

— La vieille bête ! dit-elle, sans s’astreindre aucunement au sotto voce.

Madame Leake l’entendit, bien que le cornet fût au repos.

— Non, non, non, dit-elle de sa voix la plus aimable, je ne vois pas du tout qu’il soit le moins du monde une vieille bête pour cela. Il est vieux, sans doute, et il a certainement besoin d’argent ; mais, d’un côté, il a un