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bien l’homme mondain, ainsi que celui qui est cruel, dur, avaricieux ou Injuste. Ce qui fait que les avares et les injustes échappent au châtiment, ce n’est pas l’ignorance, c’est l’indifférence du monde au sujet de leurs vices.

— Et maintenant, sir Lionel, si vous voulez vous mettre en voiture, nous ne vous retiendrons plus, dit mademoiselle Todd qui rentra avec son châle et son chapeau.

Madame Leake, qui vivait à Rissbury, était une vieille dame sourde qui ne jouissait pas d’une grande faveur auprès des autres vieilles dames de Littlebath. Personne n’ignore, je pense, que le village de Rissbury est presque un faubourg de Littlebath.

Madame Leake n’était pas généralement aimée, parce que, tout en ayant l’oreille paresseuse, elle avait la langue singulièrement active. Elle avait la réputation de savoir dire des choses plus mordantes qu’aucune autre dame de Littlebath ; or, les dames de Littlebath sont très-disposées à être mordantes. Et puis, madame Leake ne jouait pas, ne donnait pas de soupers, en un mot, n’ajoutait que fort peu, de quelque façon que ce fût, au bonheur de ces autres dames, ses compatriotes. Mais elle vivait dans une grande maison qui lui appartenait, tandis que les autres habitaient des appartements meublés ; elle avait une voiture à deux chevaux, au lieu que les autres n’avaient qu’un seul cheval ; enfin, elle entretenait certaines relations mystérieuses avec les châteaux du voisinage, ce qui faisait un grand effet sur le monde de Littlebath, bien qu’on n’ait ja-