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court, il faisait ouvertement allusion à cette parenté. Il semblait avoir pris son parti du mariage. Malgré ses prières à George, malgré ses efforts pour le tenter, et la profonde douleur que lui avait causée son insuccès, il paraissait satisfait. Il ne s’était, du reste, jamais opposé à ce mariage. Lorsque Caroline lui en avait parlé pour la première fois, il avait fait quelque allusion bourrue à l’inconstance des femmes ; mais en même temps il avait déclaré qu’il ne ferait aucune objection.

Et pourquoi en aurait-il fait ? Sir Henry Harcourt était, sous tous les rapports, un excellent parti pour sa petite-fille. M. Bertram avait souvent reproché à son neveu George de ne pas savoir faire son chemin. Sir Henri, lui, avait fait son chemin, et il ne semblait pas encore près de s’arrêter. N’y avait-il pas de bonnes raisons de croire qu’un homme qui, à trente ans, était solliciteur général, serait avant la cinquantaine un grand personnage, — lord chancelier ou lord-chief-justice, peut-être ? Donc, M. Bertram, cela va sans dire, ne fit pas d’objection.

Toutefois, son approbation ne fut pas très-cordialement exprimée. Les vieux millionnaires n’ont qu’un seul moyen de montrer de la cordialité. Ce n’est ni par des poignées de main, ni par des paroles gracieuses, ni par des regards approbateurs qu’ils y parviennent. Leurs caresses ne satisfont pas ; leurs plus aimables discours, quand ils ne s’appuient sur rien, paraissent toujours froids. Un vieillard, s’il veut être cordial, devra, en pareil cas, parler de centaines de mille francs.