Page:Trollope - Les Bertram, volume 1.djvu/88

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

même. Quant à mon père, si vous aviez de pareils sentiments à son égard, pourquoi l’avez-vous laissé encourir cette dette envers vous ?

— Il fallait donc te laisser chasser de chez Wilkinson et mourir de faim sur le revers d’un fossé ? Maintenant, si tu peux réprimer un instant tes beaux sentiments, écoute-moi. Je ne t’ai jamais blâmé en cette affaire le moins du monde, et je ne te blâme pas maintenant, — c’est-à-dire pas encore.

— J’espère que vous ne me blâmerez jamais, — pour les questions d’argent, s’entend.

— Veux-tu m’écouter ? Il me semble que tu te fourvoies au sujet de ta carrière. Tu n’aimes pas le commerce, et ce que tu disais l’autre jour à propos du capital est bien vrai. Je tiens pour un coquin l’homme qui se met dans le commerce sans capital. En petit, nous aurions pu peut-être arranger la chose…, mais en très-petit ; cela ne t’aurait pas convenu.

— Ni en petit ni en grand, mon oncle.

— Très-bien. Tu n’as pas à craindre qu’on te fasse violence pour quelque chose de grand. Il me semble, après tout, que tu es taillé pour faire un avocat.

Le jeune Bertram hésita un instant.

— Je ne sais, mon oncle. Quelquefois je me sens un étrange désir d’entrer dans les ordres.

— Étrange désir en effet ! Mais si tu voulais m’écouter… Voici ce que c’est. J’ai parlé à M. Dry. MM. Dry et Stickatit font mes affaires depuis quarante ans. Eh bien ! George, je t’avancerai soixante-quinze mille francs à quatre pour cent…