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triste visage lui dit clairement que tout allait, au contraire, aussi mal que possible.

C’était encore la beauté, la dignité, et, jusqu’à un certain point, le calme de Junon ; mais c’était une Junon en proie à la douleur, à la jalousie, au désespoir, — une Junon qui n’oubliait pas pourtant son piédestal, et qui se savait un objet d’admiration pour les dieux et pour les hommes. Combien de temps ce rôle de déesse la soutiendra-t-il ? combien de temps ? Hélas !

— Est-il parti ? dit mademoiselle Baker en regardant sa nièce.

— Oui, ma tante, il est parti.

— Quand reviendra-t-il ?

— Il ne reviendra pas, ma tante. Il ne reviendra plus jamais. Tout est fini, enfin.

Mademoiselle Baker demeura un instant toute tremblante, puis elle se jeta sur un siège. Elle, du moins, n’avait pas de divinité qui la soutînt. Oh ! Caroline ! s’écria-t-elle.

— Oui, tante Mary, tout est fini maintenant.

— Tu veux dire que vous vous êtes querellés, dit celle-ci qui se rappelait un vieux proverbe consolant au sujet des querelles d’amoureux. Mademoiselle Baker avait foi aux proverbes.

Le lecteur aura peut-être quelque peine à se rendre compte des sentiments de mademoiselle Baker au sujet de ce mariage. Il n’y avait pas longtemps qu’elle conseillait à sa nièce de rompre son engagement avec Bertram, et maintenant on la voit au désespoir, parce