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Bertram demeurait immobile et silencieux, et Harcourt, voyant sa douleur, se repentit presque de ce qu’il venait de faire. Mais il se dit qu’après tout il n’avait raconté que la vérité. La lettre lui avait été montrée en effet par Caroline.

— C’est incroyable, incroyable ! Mais sa voix prouvait assez combien, au contraire, la chose lui paraissait croyable.

— Soit, dit Harcourt en attribuant à dessein un autre sens à ces paroles. Je ne vous demande pas de me croire. N’en parlons plus ! Venez donc, il est temps que nous reprenions le chemin de Londres. Mais Bertram ne bougeait pas, ne répondait pas.

Harcourt appela le garçon et paya la note. Puis il fit le compte de Bertram, et, en signe de départ, se mit à brosser son chapeau. Bertram tira sa bourse, donna à Harcourt ce qu’il lui devait, et se rassit en silence.

— Allons, Bertram, ce train-ci est l’avant-dernier, et vous savez qu’à l’autre il y a toujours une foule énorme. Partons.

Mais Bertram ne bougea pas.

— Si cela vous était égal, Harcourt, dit-il enfin très-doucement, je préférais m’en retourner seul aujourd’hui. Ce que vous venez de me dire m’a troublé. Je rentrerai probablement à pied.

— Rentrer à pied à Londres !

— Oui, ce ne sera pas trop long ; la promenade me fera du bien. Voyons, soyez bon enfant, et ne m’attendez pas. Je vous verrai demain ou après-demain, ou d’ici à peu de temps enfin.