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court, parlant de lui en son absence, ferait son éloge avec un peu plus de chaleur. Pour le moment, il faut le dire, il eût été assez difficile de faire consciencieusement l’éloge de Bertram. Il menait une vie qui n’était ni sage ni raisonnable, surtout pour un homme qui devait se préparer à vivre de son travail. Harcourt n’avait donc pas grand’chose à dire en sa faveur. Qu’il était intelligent, honnête, sincère et courageux, tout cela mademoiselle Waddington le savait et mademoiselle Baker aussi : ce qu’elles auraient voulu s’entendre dire, c’est qu’il employait utilement toutes ces grandes qualités : Harcourt ne pouvait leur en donner l’assurance.

— Il se relèvera, vous le verrez, dit Harcourt à Caroline un jour qu’ils se trouvaient seuls, je n’en doute pas. Avec son talent et son amour sincère du bien, il est tout à fait impossible qu’il se perde. Mais le présent est si important ! Il est si difficile de rattraper même une seule année perdue !

— Oui, vous avez raison, dit Caroline, mais tout cela me serait à peu près égal si je croyais…

— Si vous croyiez… ?

— Si je croyais que son caractère ne fût pas changé. Il était autrefois si franc, si sincère, si… si… si affectueux.

— Les hommes changent souvent sous ce rapport. Ils deviennent, non pas moins affectueux, mais moins démonstratifs.

Mademoiselle Waddington ne répondit pas. Ce qu’il disait était peut-être vrai ; mais c’était singulier de la