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moment où la tante Mary fut sur le point de céder, mais Caroline ne bougea pas plus qu’un roc. Toute l’éloquence de George — et il fut très-éloquent — demeura sans effet. Le ton de Caroline s’adoucit, ses manières devinrent affectueuses, presque tendres : mais rien ne put l’engager à se rétracter. Bertram prit la chose de fort haut, et dit que cet ajournement équivalait à l’annulation de toute promesse. Caroline ne se fâcha pas ; elle ne le prit pas au mot ; mais elle lui dit à voix basse qu’elle sentait bien que par la résolution qu’elle avait annoncée elle lui avait donné le droit de se dégager. Il pouvait reprendre sa liberté sans manquer à la loyauté. Mais elle ajouta, qu’en ce qui la concernait, ce serait manquer à la vérité que de prétendre qu’une pareille décision lui ferait plaisir ; qu’elle lui ferait… lui ferait… pour la première fois l’émotion la gagna, et, avant qu’elle pût achever, George était à ses pieds, lui jurant qu’il ne voulait pas, qu’il ne pouvait pas vivre sans elle, qu’elle devait bien savoir qu’il ne le voulait ni le pouvait.

Ainsi finit la petite conférence. George certainement ne l’avait pas emporté. Caroline, en revanche, avait réussi à faire connaître sa résolution, sans pour cela perdre son prétendu. Chaque fois qu’elle avait répété sa détermination de ne pas se marier avant que George fût reçu avocat ; la tante Mary avait fait suivre la déclaration d’une petite clause — portant que cette décision pourrait être annulée d’un moment à l’autre par quelque nouvel acte de générosité de la part de l’oncle Bertram. Pour la tante Mary, l’oncle million-