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et des dettes, il parlait librement, et d’une façon qui choqua d’abord Bertram, mais à laquelle il finit par trouver un certain agrément. Un jeune homme est toujours un peu flatté de la familiarité d’un vieillard, et c’est pour cela que le vice chez les vieillards est si dangereux. Je ne prétends pas dire que sir Lionel cherchât à entraîner son fils au mal ; mais il lui laissa clairement entendre qu’il considérait la moralité comme un attribut spécial de l’état ecclésiastique, que les laïques n’étaient nullement tenus d’affecter, quand ils ne se trouvaient pas en compagnie de femmes que l’on devait respecter, et tromper par cette comédie.

George Bertram aimait son père et se plaisait dans sa société, mais, malgré tout, il se sentait un peu honteux et, parfois, très-attristé de sa manière d’être. George était jeune et ardent ; il ne possédait pas la force de caractère qu’il lui eût fallu pour résister au charme qu’exerçait sir Lionel, mais il se rendait bien compte qu’il eût voulu voir d’autres sentiments à son père, et il reconnaissait malgré lui, tout bas, que la sévérité de son oncle était méritée.

Il n’avait compté passer que huit jours à Constantinople ; son père trouva moyen de l’y retenir pendant un mois. Il s’était promis qu’à son retour en Angleterre il serait en position de rendre à son oncle les huit mille francs pour lesquels Pritchett lui avait ouvert un crédit : cela ne lui était plus possible. Sir Lionel faisait beaucoup de dépenses, et bien qu’à Constantinople il fût, pour ainsi dire, chez lui, George en payait toujours la plus grosse part.