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tation — qui n’est pas rare chez les hommes de génie — avait exercé, ainsi que cela arrive pour toutes les affectations, une fâcheuse influence sur son caractère. La vérité, c’est qu’il étudia avec ardeur pendant l’année qui précéda l’examen final. Il était entouré d’une clique qui le tenait pour un grand homme ; c’était un groupe d’adorateurs qui croyaient leur idole appelée à de grandes destinées et se faisaient un point d’honneur de l’appuyer dans ses faux semblants de paresse. Ils tiraient gloire de la dissipation de Bertram, racontaient des histoires un peu exagérées sur ses exploits dans leurs parties d’étudiants, et prouvaient aux conscrits, transportés d’admiration, qu’il ne songeait absolument qu’à son cheval et à son canot. Il pouvait sans doute se passer d’étude mieux que personne, et pourtant le pauvre Wilkinson ne fut pas vaincu sans effort. On peut affirmer que personne n’arrive à être double-premier, en quelque chose que ce soit, sans effort. Toujours est-il que Wilkinson était assis tout seul, et fort malheureux, dans son logement au collège de Balliol, tandis qu’on célébrait le triomphe de Bertram au collège de Trinité.

Il est triste d’avoir à écrire à son père pour lui apprendre qu’on a échoué quand le succès a été ardemment désiré. Arthur Wilkinson eût été casé pour la vie — casé de la façon qui semblait la plus désirable à son père et à lui dans ce moment-là, — si son nom avait figuré sur la liste de première classe. Son père n’avait osé espérer un titre de double-premier ; mais, tout en se promettant de ne pas l’espérer, il s’était