Page:Trollope - Les Bertram, volume 1.djvu/188

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

parfaitement en droit de faire savoir au monde entier qu’elle consent à lui appartenir. Chacun sait ce que veut dire une jeune fille, quand elle renvoie à ses parents pour sa réponse. Il faut que le ton d’une femme soit décidé, — très-décidé, — si elle veut que son « non » soit pris au sérieux. Or, le ton de Caroline n’avait pas été très-décidé, tant s’en faut.

Quelles que fussent les pensées ou les espérances de Bertram, il n’en parla plus pour le moment, il redescendit la côte en silence avec Caroline. Son visage s’était un peu rembruni, mais on n’y lisait pas l’accablement d’un amoureux éconduit. Le feu qui brillait dans ses yeux et l’expression de sa bouche disaient assez qu’il ne regardait pas tout espoir comme perdu ; et, avant d’arriver au bas de la colline, il avait résolu que Caroline Waddington serait sa femme, en dépit de tous les obstacles. Mais on sait qu’il prenait facilement les résolutions, et que, facilement aussi, il s’en laissait détourner.

Caroline fit également la route en silence. Elle sentait que sa réponse avait été ambiguë ; mais il lui convenait qu’il en fût ainsi. Elle comptait, une fois rentrée chez elle, penser froidement à cette proposition, et en peser le pour et le contre. Elle se consulterait consciencieusement pour savoir si elle pouvait se permettre d’aimer cet homme qui, elle le reconnaissait, était si digne d’amour. Mais l’idée de s’adresser à d’autres, de consulter sa tante, par exemple, ne lui vint pas à l’esprit.

Mademoiselle Todd et mademoiselle Baker étaient