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— Oh ! je n’ai pas vu le visage, mais c’était certainement un juif ou un chrétien. Songez donc ! Peut-être que ces restes ont été là depuis dix-huit cents ans. N’est-ce pas singulier ? Maman, voici tout juste l’endroit où j’ai perdu mon ombrelle.

Sir Lionel marchait à la tête de la cavalcade avec mademoiselle Todd, mais George Bertram restait fidèle à ses nouvelles amies, mademoiselle Baker et sa nièce. Pendant quelque temps M. Cruse et M. Mac-Gabbery firent de même. La tante et la nièce chevauchaient côte à côte, de sorte que la plus âgée des deux dames avait sa part de toutes ces attentions. À vrai dire, le moyen le plus facile de se faire écouter de la belle Caroline semblait être de s’adresser à sa tante, et M. Mac-Gabbery, désespéré, aurait depuis longtemps battu en retraite, si son courage n’eût été entretenu par les rayons que laissait tomber sur lui l’aimable bonne humeur de mademoiselle Baker. Il avait eu la bonne fortune de voyager avec ces dames pendant quelques jours en traversant le désert, et il s’était aperçu que cette circonstance heureuse lui avait donné une supériorité très-marquée sur M. Cruse. Pourquoi n’aurait-elle pas la même efficacité à l’égard du nouvel intrus, George Bertram ? Il s’était longuement interrogé à ce sujet pendant la matinée, il s’était reproché sa pusillanimité, et il avait fortifié son courage en se redisant de vieux aphorismes sur le goût des femmes pour les audacieux, et aussi en avalant un petit verre de cognac. Il était donc tout disposé, si l’occasion se présentait, à se rendre aussi désagréable que possible à ce pauvre George.