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daignera plus faire attention à ses représentations ; il interrogera son Guide-Murray, posera tranquillement son chapeau sur les marches de l’autel, et poursuivra l’étude de son sujet. Tout le monde — Allemands, Français, Espagnols et Italiens — tous les hommes de toutes les nations, sauront, à n’en pouvoir douter, que cette vilaine veste de chasse grise sert d’enveloppe à un Anglais. L’Anglais ne se soucie de personne. Si quelqu’un le dérange ou le vexe, il sait d’ordinaire se faire justice ; et, s’il n’y parvient pas, n’a-t-il pas derrière lui lord Malmesbury ou lord Clarendon ? Mais, que dirait-il si quelque Italien voyageur venait en Angleterre se promener dans son église et troubler son culte ?

Mademoiselle Todd savait bien qu’elle allait faire une chose ridicule, mais son sang anglais lui échauffait le cœur. Les Todd étaient gens à ne pas s’effrayer de peu, et mademoiselle Todd se promettait d’être digne d’eux. Il est vrai qu’elle n’avait point eu l’intention de faire goûter douze personnes sur un sépulcre juif, mais puisqu’elles se trouvaient là, comptant sur elle pour leur nourriture, elle n’était point femme à les renvoyer à jeun : elle se mit donc bravement à leur tête et sortit par la porte de Jaffa, suivie de sir Lionel, monté sur un âne.

En quittant la ville, ils tournèrent tout de suite à gauche. Leur route les conduisit à travers les vallées de Gihon et d’Hinnom, parmi d’étranges sépulcres ouverts, excavés dans les flancs de la montagne, qui ne ressemblent en rien à ceux de la vallée de Josaphat.