Page:Trollope - Les Bertram, volume 1.djvu/143

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

rait pu, non plus, l’appeler retroussé ; mais il avait, sans contredit, une certaine tendance de ce côté-là, et les narines étaient plus mobiles et plus promptes à se dilater avec indignation que ne le sont jamais les narines de vos vrais nez grecs.

Le contour du visage était admirable, les lignes de la joue et du menton, d’une pureté sans égale. Les gens par trop exigeants pouvaient seulement regretter l’absence de la moindre fossette ; mais au bout du compte, ce n’est que le joli qui veut des fossettes, la beauté épanouie et complète peut se passer de ce secours.

Mais les yeux ! les yeux de Caroline Waddington ! Les yeux sont la citadelle, la forteresse du poëte, et pour les décrire il doit rassembler toutes ses forces et déployer toute sa puissance. Donc, les yeux de Caroline Waddington étaient brillants, assez grands, et bien encadrés dans le visage. C’étaient des yeux intelligents, et, de plus, des yeux honnêtes, ce qui vaut encore mieux. C’étaient des yeux hardis, allais-je ajouter, mais ce mot impliquerait une critique ; je dirai donc plutôt que c’étaient des yeux vaillants, — des yeux courageux et expressifs qui ne se dérobaient jamais, et qui laissaient même percer parfois une certaine méfiance. Ils auraient mieux convenu peut-être à un homme qu’à une belle jeune fille comme Caroline Waddington.

Mais de toutes ses grâces, la plus merveilleuse sans contredit résidait dans sa démarche : « Vera incessu patuit Dea. » Hélas ! combien peu de femmes savent réellement marcher ! La plupart d’entre elles roulent,