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ouvrit non moins lentement le tiroir, duquel il tira une liasse de papiers entourée d’un ruban rouge. Il défit le nœud, et, plaçant devant lui les papiers, il examina celui qui était au-dessus. Puis, les répandant devant lui, toujours avec la même lenteur, il garda dans sa main celui qu’il avait pris d’abord. En réalité, il songeait à ce qu’il devait dire. Il avait pensé, mais sans y compter beaucoup, qu’un autre acte pourrait être trouvé dans le tiroir. Tout près de lui, à sa droite, était le docteur Powell. Autour de la pièce, à quelque distance, étaient assis les six fermiers, tenant leur chapeau dans leurs mains, entre leurs genoux. Sur un sofa, vis-à-via, étaient Isabel et la femme de charge. Le cousin Henry était assis seul, près de l’une des extrémités du sofa, presque au centre de la pièce. Pendant que la cérémonie se continuait, l’une de ses mains tremblait tellement qu’il s’efforçait de la maintenir avec l’autre. Il n’était pas possible que l’on ne remarquât pas ce tremblement et le malaise trop évident du jeune homme.

Le testament qui était au-dessus du paquet fut ouvert lentement par l’homme de loi, qui l’étala avec la main avant d’en commencer la lecture. Puis il en regarda la date, pour s’assurer que c’était bien le dernier de ceux qu’il avait déjà rédigés lui-même. Il ne l’ignorait pas, d’ailleurs, et il savait que l’acte était légalement irréprochable. Il aurait pu en expliquer toutes les clauses sans en lire un mot, et c’était probablement ce qu’il aurait à faire avant la fin de la séance ; mais il différait, les yeux fixés sur le papier, dont il effaçait toujours les plis avec la main, se donnant évidemment quelques minutes pour recueillir ses idées. Le testament qu’il avait sous la main lui avait toujours déplu : Indefer l’avait fait contrairement à ses avis, et c’était ce qui avait amené la « gronderie » dont le vieillard s’était plaint à Isabel. Il donnait la