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— Me déplaire ! Vous m’avez toujours plu. Vous me plaisez.

— J’espérais mieux. Peut-être pensais-je qu’il y avait dans votre cœur plus que cela pour moi. Non, Isabel, ne m’interrompez pas. Quand on m’a dit que vous deviez être l’héritière de votre oncle, j’ai compris que vous ne deviez pas m’épouser.

— Pourquoi non ?

— Parce que je pensais que cela ne devait pas être. Je savais que votre oncle le jugeait ainsi.

— Oui, il a jugé ainsi.

— Je le savais bien ; dans ma pensée, votre lettre ne faisait que m’apporter sa décision. Mon intention n’était pas de demander la main de l’héritière de Llanfeare.

— Pourquoi pas ? pourquoi pas ?

— Je n’avais pas l’intention de demander la main de l’héritière de Llanfeare, dit-il, en répétant ses paroles. J’ai appris hier soir que vous ne l’étiez plus.

— Non, je ne suis plus héritière.

— Pourquoi alors Isabel Brodrick ne serait-elle pas la femme de William Owen, s’il ne lui déplaît pas, si seulement elle croit pouvoir arriver à l’aimer assez pour cela ? »

Elle ne pouvait dire qu’elle ne l’aimait pas assez pour cela. C’eût été un mensonge qu’elle ne pouvait prendre sur elle de faire, et pourtant sa résolution n’était pas ébranlée. Ayant refusé William quand elle se croyait riche, elle ne pouvait le prendre maintenant qu’elle était pauvre. Elle secoua tristement la tête.

« Vous ne m’aimez pas assez pour cela ?

— Ce mariage ne doit pas se faire.

— Ce mariage ne doit pas se faire ? Et pourquoi ?

— Il ne peut se faire.

— Alors Isabel, dites que vous ne m’aimez pas.