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je vous dire qu’il a mis sur la propriété, en ma faveur, une charge, grâce à laquelle je ne serai pas un fardeau pour vous. »

Huit ou dix jours après cette conversation, une quinzaine de jours après son arrivée à Hereford, elle apprit que William Owen devait venir prendre le thé. Cet avis lui fut donné par sa belle-mère avec le ton sérieux que l’on prend pour annoncer une chose que l’on juge importante. Si c’eût été un autre chanoine ou un autre jeune homme qui avait dû venir prendre le thé, la communication eût été faite avec moins de solennité.

« Je serai enchantée de le voir, » dit Isabel, réprimant avec son énergie habituelle le plus léger signe d’émotion.

— Je l’espère, ma chère. Je suis certaine qu’il a le plus grand désir de vous voir. »

M. Owen vint prendre le thé avec la famille. Isabel put remarquer qu’il était un peu troublé, qu’il ne parlait pas avec la même liberté que d’ordinaire, et qu’il était embarrassé dans son attitude envers elle. Elle prit part à la conversation, comme s’il n’y avait entre eux rien de particulier. Elle parla de Llanfeare, de la santé affaiblie de son oncle, de la visite de son cousin, prenant soin de faire comprendre, par quelques paroles dites comme par hasard, que Henry avait été reçu en héritier. Elle joua bien son rôle, ne manifestant aucune émotion ; mais son oreille était au guet pour surprendre la plus légère altération dans la voix de William, après qu’elle lui eût appris sa situation nouvelle. Cette altération, elle la sentit, mais elle l’interpréta mal.

« Je viendrai dans la matinée, » dit-il en lui donnant la main à son départ. Sa main ne pressa pas celle d’Isabel, mais c’était à elle spécialement qu’il s’était adressé.