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fermiers mais cela ne lui réussit guère. S’il y avait ici un toit qui tombait, là une porte qui fermait mal, il déployait son zèle en entretenant son oncle de ces dégâts. Mais le vieillard n’aimait pas qu’on lui parlât de ce genre de détails. Il faut reconnaître que seul un homme de grand mérite aurait pu se comporter à l’entière satisfaction du vieillard, dans la position où était le jeune homme.

Mais aussitôt qu’Isabel fut partie, il fit connaître à son oncle qu’il lui avait obéi.

« Je lui ai demandé sa main, monsieur ; elle m’a refusé, dit-il à voix basse, d’un ton mélancolique et pénétré.

— Qu’attendiez-vous donc ?

— À tout prix, j’ai voulu vous obéir.

— Devait-elle vous sauter au cou, quand vous lui avez demandé sa main ?

— Elle était décidée, très décidée. Naturellement, je lui ai dit votre désir.

— Je n’ai pas de désir.

— Je croyais que vous désiriez ce mariage.

— Je l’ai désiré, mais j’ai changé d’idée. Cela n’irait pas du tout. Je puis à peine comprendre que vous ayez eu le courage de lui demander sa main. Je ne suppose pas que vous ayez été assez intelligent pour voir combien elle est différente des autres jeunes filles.

— Oh ! si, je l’ai bien vu.

— Et malgré cela, vous allez avec aisance lui demander d’être votre femme, tout comme s’il s’agissait pour vous d’acheter un cheval ! Sans doute vous lui avez dit que vous lui faisiez cette offre à cause de la propriété ?

— Je l’ai dit, » répondit le jeune homme absolument confondu et dérouté par l’attitude et les paroles de son oncle.