Page:Trollope - Le Cousin Henry.djvu/173

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Qui sera là ? » demanda le cousin Henry, après quelques moments de silence.

— Moi, » répondit le clerc en commençant par lui-même, « M. Apjohn, et peut-être un autre clerc.

— N’y aura-t-il pas aussi un avocat ? » demanda le cousin Henry, montrant par sa voix et sa physionomie combien il avait peur.

« Oh ! certes non ; il n’y en aura pas à Carmarthen avant les assises. Un avocat ne voit jamais son client. Vous paraîtrez comme témoin, et vous n’aurez pas affaire aux avocats avant le moment de l’interrogatoire. M. Balsam est un excellent homme.

— C’est par moi qu’il est employé ?

— Oui, il est de notre côté. Peu importe d’ailleurs quel avocat on a pour soi, mais c’est l’autre, celui par qui on est empoigné…

— Quel est l’avocat de mon adversaire ? » demanda le cousin Henry.

— Vous ne le savez pas ? » Le ton avec lequel il dit ces paroles frappa de terreur le malheureux. Il exprimait une sorte d’effroi et de pitié ; c’était comme un avis de préparer son âme à une catastrophe inévitable. « Ils ont M. Cheekey ! » Et la voix devint plus lugubre encore. « J’ai bien pensé qu’ils le prendraient quand j’ai connu l’affaire. Ils ont M. Cheekey ! On voit bien qu’ils ne craignent pas de dépenser de l’argent. J’ai connu bien des avocats redoutables, je n’en ai pas vu un aussi terrible que M. Cheekey.

— Il ne me mangera pas, » dit le cousin Henry, essayant de faire bonne contenance.

— Non, il ne vous mangera pas ; ce n’est pas ainsi qu’il procède. J’en ai connu qui avaient l’air de vouloir manger leur homme. Lui, il semble vouloir vous écorcher, pour laisser ensuite votre carcasse aux oiseaux. Mais, au premier abord, c’est un homme aimable que M. Cheekey.