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oncle le trouvait bien ; tout ce qu’elle aurait demandé, elle l’eût obtenu ; mais elle ne demandait rien. À cette époque, le cousin avait été placé dans des bureaux, à Londres, et était devenu, — du moins on le disait, — un travailleur sérieux. Cependant, quand il lui était permis de se montrer à Llanfeare, il continuait à déplaire à tout le monde, sauf peut-être au vieillard. Il était certain que, dans son emploi, il se rendait utile, et il semblait qu’il eût perdu l’habitude de faire des dettes et d’envoyer les billets à Llanfeare, pratique qu’il avait suivie au commencement de sa carrière.

Pendant tout ce temps, le vieillard était dans la plus pénible hésitation au sujet de la transmission de la propriété. Son testament était toujours à la portée de sa main. Jusqu’au moment où Isabel atteignit vingt et un ans, ce testament avait été fait en faveur de Henry, avec cette clause pourtant, qu’une somme d’argent, que possédait le testateur, appartiendrait à Isabel. Ensuite, son antipathie pour son neveu changea ses intentions : il fit un autre testament, en faveur de sa nièce. Les choses en restèrent là pendant trois ans ; mais ce furent pour lui trois années de tourments. Il s’était fait difficilement à la pensée que la propriété passerait en dehors de ce qu’il appelait la ligne mâle directe. Selon lui, c’était par accident que le pouvoir de disposer de la propriété était dans ses mains. C’était un principe auquel il fallait obéir religieusement que, dans l’Angleterre, une terre passât du père au fils aîné, et, à défaut du fils, à l’héritier mâle le plus proche. L’Angleterre ne serait pas ruinée parce que Llanfeare serait transmis en dehors de l’ordre régulier, mais l’Angleterre serait ruinée si les Anglais n’accomplissaient pas les devoirs qui leur incombaient à chacun dans la situation à laquelle Dieu les avait appelés ; et, dans