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j’ai mon opinion, mais je ne dis rien. Il y en a d’autres qui ne se gênent pas, vous devez le savoir, monsieur Jones ; mais moi, je ne dis rien.

— Comment osez-vous parler si insolemment à votre maître ?

— Mon maître ? Je n’en sais rien. Je sais que mon père a un bail et qu’il paye son fermage, que ce soit un autre ou vous qui le receviez ; et mon opinion est que vous n’avez pas plus le droit qu’un autre étranger d’entrer chez nous. Sortez donc d’ici, s’il vous plaît.

— Je resterai aussi longtemps qu’il me conviendra, » dit le cousin Henry.

« Très bien ! Alors mon père vous fera un procès pour violation de propriété, et vous devrez vous présenter devant une cour de justice. Une fois cité, vous serez bien obligé d’y aller. Vous avez beau vous appeler propriétaire, vous n’avez aucun droit ici. Si vous avancez, je vous rosserai, voilà tout. Vous n’oseriez pas paraître devant un magistrat ; bien sûr, vous n’oseriez pas. »

Le jeune homme resta quelque temps comme s’il attendait une réponse ; puis il partit avec un grand éclat de rire.

On pouvait donc impunément l’insulter et le battre sans qu’il pût obtenir réparation, puisqu’il n’osait pas se soumettre à l’épreuve du témoignage en justice. Tout le monde le savait autour de lui. Sa position fausse ou sa lâcheté le tenaient en dehors de la protection de la loi. Évidemment il fallait agir de quelque manière ; et, n’ayant pas le courage de se noyer, il devait se rendre chez M. Griffiths et lui débiter son mensonge. Il irait sur-le-champ. Il n’avait ni le livre ni le testament, mais peut-être n’en serait-il que plus à l’aise pour parler.

À Coed, il trouva le fermier dans sa cour.