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homme d’affaires sérieux. Il était affectueux, à une table bien servie, toujours prêt à obliger, quand il avait le fusil à la main ; il était de la plus charmante humeur, quand il faisait une promenade à cheval. C’était un pêcheur adroit et il avait une faiblesse pour le whist. On ne le regardait certainement pas comme un homme dur ou cruel. Mais le cousin Henry lui avait toujours vu l’œil sévère, les sourcils froncés, et était fort mal à l’aise devant lui. Dès le début de leurs relations, il avait eu peur de lui. Il sentait que cet homme cherchait toujours à lire dans son cœur et à le trouver coupable. M. Apjohn avait été naturellement favorable à Isabel. Tout Carmarthen savait qu’il avait fait son possible pour amener le vieillard à conserver son héritage à sa nièce. Le cousin Henry ne l’ignorait pas. Mais pourquoi cependant l’avoué ne le regardait-il jamais qu’avec des yeux accusateurs ? Quand lui, Henry Jones, avait signé cette déclaration à Carmarthen, l’avoué avait montré, par l’expression de son visage, qu’il croyait la déclaration fausse. Et cet homme était là, devant lui, et il lui fallait endurer ses questions.

« M. Jones, dit l’homme de loi, j’ai cru qu’il était de mon devoir de faire près de vous une démarche à l’occasion de ces articles de la Gazette de Carmarthen ?

— Je ne puis empêcher la Gazette de Carmarthen de parler.

— Mais si, vous le pouvez, M. Jones. Il y a des lois qui donnent à un homme le moyen d’arrêter la diffamation et d’en faire punir les auteurs, s’il le juge à propos. » Il s’arrêta un moment ; mais, voyant que le cousin Henry ne répondait pas, il continua. « Pendant plusieurs années, j’ai été l’homme d’affaires de votre oncle, comme mon père l’avait été avant moi. Vous ne m’avez jamais chargé de vos intérêts,