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s’il ne montrait par aucun signe qu’il savait que cet acte existait, on ne pourrait prouver qu’il en eût connaissance. Si seulement on pouvait trouver le testament, et le laisser ensuite lui-même retourner à sa vie tranquille de Londres ! Mais on ne le trouvait pas, et il ne pouvait mettre personne sur la trace. Quant à ces articles diffamatoires, M. Griffiths lui avait demandé pourquoi il n’en attaquait pas les auteurs en justice et ne les confondait pas par une attitude énergique. Il comprenait toute la justesse, toute la force de cette observation. Pourquoi ne se montrait-il pas capable d’entendre sans trouble les observations qu’un avocat retors lui poserait ? Simplement parce qu’il n’était pas capable de les entendre. On tirerait de lui la vérité, au cours du procès. Il aurait beau prendre les plus fermes résolutions, il lui serait impossible de ne pas laisser voir à ses adversaires qu’il n’ignorait pas l’existence du testament. Il se connaissait assez pour en être convaincu. Il était assuré que, par son attitude, il témoignerait si fortement contre lui-même, qu’il passerait du banc des témoins dans la prison.

Le journal dirait ce qu’il voudrait, il n’irait pas, de son propre mouvement, se jeter dans la gueule du lion. Mais, en prenant cette détermination, il ne prévoyait pas par quels moyens irrésistibles on l’y entraînerait. Quand le vieux fermier lui avait dit sévèrement qu’il devait avoir le courage d’aller témoigner devant la cour et tout raconter sous la foi du serment, il avait frémi en recevant cet avis. Mais c’était peu de chose auprès de ce qui l’attendait. Le lendemain matin arriva à Llanfeare M. Apjohn venant de Carmarthen ; il fut sur-le-champ introduit dans la bibliothèque. L’avoué était un homme que ses amis et ses clients en général considéraient comme un agréable compagnon, mais comme un