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suivant le propriétaire du journal comme diffamateur. S’il était innocent, entièrement innocent, il n’avait aucune raison de craindre l’interrogatoire auquel le soumettrait la partie adverse. Enfin dans la Gazette, étaient insérées deux lettres du jeune Cantor, lettres évidemment diffamatoires, qui n’avaient pas été rédigées par le jeune Cantor lui-même, lettres que tout Carmarthen savait avoir été écrites par l’un des rédacteurs du journal et signées par le jeune fermier ; on y déclarait formellement que le vieil Indefer avait laissé un testament postérieur à celui qui constituait Henry Jones héritier. Quand on discuta la question de savoir si Henry Jones obtiendrait ou non du jury un verdict favorable, M. Apjohn déclara que ce n’était pas là l’objet principal de la poursuite. « Il devra montrer, dit-il, qu’il n’a pas peur de paraître devant une cour de justice. »

Mais il en avait peur. Quand nous l’avons laissé, après sa visite à Coed, il ignorait encore les attaques dirigées contre lui. Le lendemain, il reçut un premier numéro du journal, puis d’autres régulièrement. Après avoir lu le premier, il ne put s’empêcher de lire les suivants. Ils étaient introduits dans la maison à mesure qu’ils s’imprimaient, et l’on disait dans Carmarthen qu’il buvait jusqu’à la dernière goutte l’amer venin que la plume du rédacteur y distillait à son intention. En vain il s’efforçait de cacher le journal ou de paraître le recevoir avec indifférence. Mrs. Griffith savait toujours où il l’avait mis ; elle savait qu’il l’avait lu en entier. Le cousin Henry avait accepté qu’elle et le sommelier ne demeurassent plus qu’un mois à Llanfeare, au lieu de trois mois, comme ils l’avaient offert ; le mois était écoulé, le sommelier était parti, Mrs. Griffith et les deux autres femmes restaient, sans dire pourquoi elles