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« Est-il possible ! » et avait détourné la tête avec compassion. Quant à M. Wilkins, il s’était soulevé en disant : « Qu’y-a-t-il ? »

Et Sophie ?… Elle était devenue blanche, puis verte et enfin extrêmement rouge, et s’était écriée d’une voix tonnante :

« Infâme imposteur !… Et vous autres, êtes-vous des hommes ? Vous oubliez donc que vous devez me défendre ? Faites donc jeter ce fourbe hors de chez moi ! »

Sir Charles la regarda avec pitié, mais ne répondit pas. Le major secoua la tête, garda un instant le silence, et dit enfin à haute voix :

« Nous ne pouvons nier votre identité, Cornélius ; il faut être hors d’état de raisonner pour vous accuser d’une fraude semblable, et nous vous reconnaissons parfaitement. Mais pour l’amour de Dieu, mon ami, dites-moi pourquoi vous êtes resté si longtemps loin de nous. »

En entendant ces mots décisifs, Sophie se leva et sortit précipitamment de la chambre sans regarder autour d’elle. Elle monta dans sa chambre où elle s’enferma : puis, ouvrant tous ses tiroirs, elle fit un petit paquet de tout ce qui avait de la valeur en robes et en dentelles, sans oublier le collier de perles et les autres cadeaux précieux qu’elle avait reçus de M. Jenkins. Quand elle mit la main sur les riches diamants de famille, elle hésita : il lui répugnait d’être arrêtée comme une voleuse et forcée de rendre ce qu’elle avait dérobé. D’un autre côté, il lui était bien pénible de se séparer pour toujours de ces magnifiques joyaux ; aussi les joignit-elle fébrilement à son paquet, en murmurant d’un ton de défi et de colère :

« Qu’ils me fassent arrêter et traîner en prison, s’ils l’osent. Ce vagabond qui me dépouille ne parviendra pas à me les arracher. »

En disant ces mots, Sophie reprit les diamants, les