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rence, ses attraits et sa naïveté charmaient M. Thorpe, qui aurait peut-être préféré l’azur de ses yeux à celui du ciel d’Orient, et aurait volontiers abandonné le pays qu’échauffaient les rayons du soleil pour ne plus quitter celui qu’embellissait le sourire de la jeune fille ; mais cet espoir ne fut que passager, car le voyageur s’aperçut bientôt que Florence aimait et qu’elle était aimée.

Sir Charles, qui suivait avec intérêt les mouvements et jusqu’aux sourires du fils de son ancien ami, rendait justice à l’habileté et à la lenteur avec lesquelles M. Jenkins marchait vers son but. En effet, le riche marchand de Madras était parvenu à entrer dans l’intimité de toute sa famille ; il avait su, par quelques paroles dénotant ses intentions généreuses, et aussi par d’élégants cadeaux adroitement offerts, se faire très-bien venir des dames, avec lesquelles il avait intérêt à causer librement. Du reste il avait toujours soin, par ses prévenances et sa préférence marquée pour Sophie, d’éloigner de la tête de l’héritière toute pensée de jalousie contre ses parentes. Depuis leur premier voyage à Thorpe-Combe les Spencers et les Wilkins avaient conservé des relations amicales, et même Elfreda entretenait avec son oncle Spencer une correspondance très-suivie et très-affectueuse.

M. Spencer, après avoir reçu l’invitation de Sophie Martin-Thorpe, voulut savoir si les Wilkins avaient été invités et s’ils s’étaient rendus chez leur cousine. Il écrivit donc à miss Elfreda ; mais la lettre étant arrivée à Llanvellyn-Lodge après le départ de la famille, elle fut renvoyée à Thorpe-Combe et l’aînée des miss galloises la reçut un matin à table.

« Avez-vous connu M. Spencer, murmura miss Elfreda à l’oreille de son voisin M. Jenkins, après avoir jeté un coup d’œil sur la lettre de son oncle, lorsque vous habitiez ce pays ?