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moment. Quant à me débarrasser des Heathcote sans procès ni discussions, rien ne me paraît mieux. Je n’y mettrai aucun obstacle. Je ne puis pas croire que le major s’appuie jamais de son droit de tuteur pour me violenter ; je le connais assez pour ne pas faire une pareille supposition. D’ailleurs votre moyen me convient assez, et il est fort possible que je l’adopte. »

M. Brandenberry était ravi de cette conclusion ; il savait parfaitement que l’héritière ne voudrait pas vivre seule, que du reste sir Charles ne le lui permettrait pas, et que, si sa sœur venait chez Sophie, ses affaires à lui prendraient une excellente tournure.

« Je ne vais pas vous retenir plus longtemps, charmante jeune personne ; vous pourrez mieux réfléchir à ce que je vous conseille lorsque vous serez seule ; tout ce que je vous recommande, si vous écrivez à sir Charles, c’est de vous montrer ferme et décidée à rompre avec votre tuteur. Adieu ! adieu, jeune et adorable Sophie… »

Puis, baisant la main de l’héritière, il s’enfuit dans l’ombre en se félicitant de son succès. Miss Martin Thorpe repassa dans son esprit tous les motifs de haine qu’elle avait amassés contre les Heathcote, et particulièrement contre la jolie Florence, à laquelle M. Jenkins allait peut-être s’attacher et donner tous les bijoux et les objets de prix dont il avait parlé ; puis, après s’être bien monté la tête contre ceux qu’elle appelait ses tyrans, elle écrivit la lettre suivante à air Charles Temple :

« Cher monsieur,

« Ce n’est pas sans une extrême répugnance que je me décide à faire la démarche que je tente auprès de vous en ce moment ; mais je crois de mon devoir