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miss Martin Thorpe, comme celle-ci haïssait l’excellente famille qui l’avait secourue lorsqu’elle était pauvre et abandonnée de tous. Seulement, mistress Barnes avait des raisons pour la détester et la mépriser. L’honnête femme de charge la haïssait pour la manière vile dont elle avait décidé le digne M. Thorpe à lui léguer ses biens, pour son avarice, son manque de cœur et son infâme conduite envers les Heathcote.

« Ne soyez pas inquiète de vos enfants, mistress Heathcote, s’écria mistress Barnes en entrant au salon : ils ne souffrent aucunement de tout ce qui se passe ici. Je viens de leur donner des confitures que j’avais dans ma chambre.

— Vous êtes bonne, excellente pour nous, mistress Barnes, et nous vous en sommes tous bien reconnaissants. Mais je vous en prie, ne vous exposez pas à être grondée pour les enfants. Ils ne sont guère habitués à manger des friandises, ne leur en donnez pas ; ils peuvent bien s’en passer, les pauvres chéris, murmura mistress Heathcote en retenant difficilement ses larmes.

— Ne vous tourmentez pas, mistress : il est inutile d’en parler à miss Martin Thorpe, qui ne peut s’apercevoir de rien. D’abord je ne pourrais pas rester ici pour soutenir ce petit être méchant et sans cœur, dans ses infamies contre vous ; et quand je lui prépare des chatteries, je ne puis m’empêcher d’en mettre de côté pour les enfants ou pour cette chère miss Florence, que Dieu bénisse. Sans vous tous, que j’aime et que je respecte, je défierais bien miss Martin Thorpe de me retenir chez elle, et je puis vous assurer que, ma nièce étant dans les mêmes intentions que moi, et voulant sortir d’ici avec moi, la vilaine avare aura bien de la peine à trouver des honnêtes gens qui consentent à nous remplacer chez elle. Quand nous n’y serons plus, elle s’apercevra de la différence des dépenses ; ce n’est